Des bâtons dans les roues de Laura Ferret Rinçon

20 Novembre 2020 , Rédigé par Marie Nel

Publié en Auto-Édition

Résumé :

Année de terminale, dernière étape avant le grand saut. Pour certains, le bac marque la fin d’une ère. Pour d’autres, c’est la promesse d’une liberté à venir. Héloïse et Deuni sont deux adolescents que tout sépare. Elle est française. Lui, finlandais. Elle s’épanouit dans le théâtre. Lui peine à s’exprimer en public. Elle est en fauteuil et heureuse. Lui combat ses fantômes intérieurs. Pourtant, leur rencontre fut une évidence. En cette époque charnière, ils ont un seul objectif : franchir la distance qui les sépare. Ce roman est la suite libre de "Comme sur des roulettes", il se déroule quelques mois après le premier tome.

À propos de l’auteure :

Née en 1994, Laura Ferret-Rincon est originaire du Sud de la France. Elle a toujours éprouvé pour les mots une affection particulière. Cette passion l’amène à suivre des études de lettres et à s’investir dans la vie d’associations littéraires. Amoureuse de Musset, Herbert ou encore Baudelaire, elle s’intéresse à tous les genres littéraires et voue aux écrivains romantiques une admiration sans bornes. Elle se lance dans l’aventure éditoriale avec son premier roman de science-fiction, Uneksa.

Mon Avis :

J'ai découvert Laura Ferret Rinçon il y a un peu plus d’un an avec « Comme sur des roulettes », qui précède celui-ci. J'avais déjà beaucoup aimé ce premier opus, et j’étais donc très contente de retrouver les personnages et de poursuivre leurs vies.

« Comme sur des roulettes » nous racontait la vie d'une jeune adolescente handicapée, Héloïse. Elle est passionnée de théâtre et grâce à elle, elle a pu partir en voyage scolaire en Finlande où elle a fait une très belle rencontre en la personne de Deuni. On les retrouve ici tous les deux un an après. C’est l’année du bac pour Héloïse, et on va la suivre au fil de son année scolaire. Se pose pour elle, comme pour tout élève de son âge, la question de la continuité des études, de son orientation. Toujours aussi passionnée par le théâtre, elle aimerait continuer dans cette voie. Les universités françaises offrent généralement cette matière en option, alors qu’elle veut en faire une matière principale. Peut-être doit-elle envisager des études à l’étranger. Et justement, pourquoi ne pas allier cela à son amour de la Finlande. Elle a gardé contact avec Deuni, ils se parlent régulièrement grâce à la magie d’internet. Mais tenir une relation à distance est loin d’être aisé. Elle doit également se confronter à l'ultra-protectionnisme de sa mère qui s’inquiète pour elle, savoir comment elle va pouvoir faire seule dans un pays étranger et tout cela en fauteuil roulant.

On va suivre également Deuni en Finlande. C’est la chose qui change par rapport au premier roman. On est alternativement en France avec Héloïse et en Finlande avec Deuni. Cela va ainsi nous permettre d’apprendre à mieux connaître ce jeune garçon. À l'inverse de Héloïse, il est plutôt renfermé, et voit peu de monde, il parle peu et est très réservé. Son histoire personnelle fait qu'il reste marqué par certains drames de sa vie. Héloïse est pour lui une bulle de fraîcheur, il est admiratif de sa volonté, il est fort attaché à elle, il la soutient dans ses choix, mais pas facile lorsqu'on ne peut pas se voir en vrai. Comment vont-ils arriver à poursuivre leur histoire, vont-ils arriver à faire face aux aléas de la vie qui n'épargnent ni l'un ni l'autre. Et en plus de cela, il faut faire accepter leurs envies et idées à leurs parents, et pour cela, ils se valent.

J'ai retrouvé le même attachement pour Héloïse ressenti au premier opus. C’est une jeune fille d'une grande force de caractère, qui ne s'apitoie pas sur son sort, et pourtant elle pourrait. Je l’aime vraiment beaucoup. Et j'ai appris cette fois-ci à connaitre Deuni et je me suis attachée à lui de la même façon. Sa vie est loin d’être simple, et les blessures sont difficiles à cicatriser. Ce sentiment d’attachement est renforcé par le choix narratif de l’auteure qui est celui que je préfère et pour lequel je suis le plus sensible. Elle a en effet utilisé la première personne du singulier pour raconter. Ce « je » me permet de me mettre encore mieux à la place du personnage, de rentrer dans sa tête et de ressentir au plus près chacune de ses émotions. Et là, je me suis mise à la fois dans la peau d’Héloïse et dans celle de Deuni, une fille, un garçon. Laura Ferret Rinçon a réussi à la perfection à parler et agir différemment selon le sexe de son personnage. Elle a très bien su se glisser dans la peau d'un garçon, et à décrire son caractère et ses actes.

L'auteure fait passer de très beaux messages au travers l’histoire de ces deux jeunes. Bien sûr, Héloïse étant handicapée et se déplaçant en fauteuil, l'accent est mis sur sa façon de vivre et ce qui peut entraver sa vie dans des gestes du quotidien. J'ai apprécié que l’auteure fasse cela, car même de nos jours, certains oublient de faciliter les accès aux personnes à mobilité réduite, et il est toujours bon de le souligner dans un roman. Ce qui est bien, c’est qu’elle le fait tout en finesse et délicatesse. Il n'y a pas de lourdeurs, cela fait vraiment partie de la vie quotidienne. Étant elle-même dans la situation de son héroïne, elle sait de quoi elle parle.
Elle transmet également d'autres messages et de belles valeurs, sur l’adolescence et la difficulté de ces jeunes gens à rentrer dans la vie adulte, les premiers amours, les amis, les copains et copines, les relations parfois tendues avec les parents qui pensent faire bien mais sont trop protecteurs. Étant maman, j'ai souvent compris la réaction de ces mères qui s’inquiètent parfois à tort pour leur progéniture. Et c’est vrai que dans ces cas là, on fait parfois pire que ce que l’on voulait et nous créons des blocages avec nos ados. L'auteure a très bien décrit la vie quotidienne de ces jeunes, avec leurs peines, leurs joies, leur rapport à la mort et au deuil. J’ai trouvé que tous ces sujets étaient abordés avec beaucoup de justesse et de pudeur.

Le style de Laura Ferret Rinçon est toujours aussi bon, comme pour le premier, elle a rendu l’histoire intéressante dès le début. Bien que la lecture du premier opus date d'il y a un an, j’ai très vite réussi à me situer toute l’histoire et les personnages. Et l'auteure fait parfois de petits rappels de quelques mots pour bien replacer le contexte.
La lecture s'est faite rapidement et avec beaucoup de fluidité. L’alternance des chapitres entre les deux personnages donnent beaucoup de rythme à la lecture, cela permet d'avoir l'avis de chacun sur une même situation, et lorsqu’on on en quitte un, on a déjà hâte de le retrouver. L’intérêt pour eux est vraiment constant tout au long des pages. Les émotions sont au rendez-vous, l'humour est bien présent aussi. En plus de Héloïse et Deuni, on suit aussi leurs amis, et certains amènent quelques bulles d'humour qui dédramatisent des situations plus lourdes.

Je pense que vous l’aurez compris à la lecture de cet avis, j’ai beaucoup aimé ce livre, l'histoire de ces deux jeunes. C’est vrai que c'est une lecture plus ciblée pour les young adultes, à cause de l’âge des protagonistes, mais je trouve qu'il peut être lu par un public plus adulte et plus vieux comme moi. J'ai l'âge de leurs mères, et j'ai souvent considéré ces ados comme les miens, me demandant comment j'aurais réagi moi à leur place, comment comprendre mes enfants, leurs angoisses et leurs peurs. Comme vous le voyez, c’est un livre qui peut toucher plusieurs tranches d’âge, et intéresser tout le monde.

Je ne peux que vous recommander la lecture de ces deux romans. Bien sûr, il vaut mieux avoir lu le premier avant de commencer celui-ci, afin d'avoir toutes les infos sur les personnages ainsi que leurs présentations. Les histoires sont tellement prenantes que vous verrez que vous les lirez rapidement. Pour ma part, je vais continuer de suivre cette jeune auteure, qui a l’âge d'une de mes filles, je lui trouve déjà beaucoup de talent, et je la lirai à nouveau avec plaisir.

Je remercie chaleureusement Laura Ferret Rinçon pour ces bons moments passés en sa compagnie et celles de ses personnages.