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Marie-Nel lit

À la lisière des vagues de Béatrice Hammer

9 Juillet 2023 , Rédigé par Marie Nel

À la lisière des vagues de Béatrice Hammer

Publié aux éditions d'Avallon

 

 

Résumé :

 

Ce matin-là, sur la table de la cuisine, Mona découvre une lettre que lui a laissée l’homme dont elle partage la vie depuis plus de 30 ans.
Il lui annonce qu'il part.
Que faire quand tout s'effondre brusquement ? Privée de son futur, submergée par le sentiment d'avoir échoué, Mona fait un pas de côté : elle s'échappe à son tour. Son errance la mène entre la terre et l'eau : à la lisière des vagues.
Et si la liberté était au rendez-vous ?

 

 

À propos de l'autrice :

 

Béatrice Hammer est romancière, scénariste et réalisatrice. Elle a publié une quinzaine d'ouvrages, notamment au Mercure de France, au Rouergue, au Serpent à plumes et chez Arléa. Les éditions d'Avallon viennent de publier son roman inédit La petite chèvre qui rêvait de prix littéraires. Elles ont également republié ses romans Kivousavé (Prix Goya, Prix Tatoulu, Prix du premier roman de l'Université d'Artois, Prix du festival du premier roman de Chambéry), Cannibale Blues (sélection Attention Talent des libraires de la FNAC), Lou et Lilas, Green.com et Les Violons de Léna.

 

 

Mon Avis :

 

J'ai retrouvé avec plaisir Béatrice Hammer avec ce nouveau roman. J'ai déjà eu le grand plaisir de lire quelques-uns de ses précédents romans, et j'ai pu à chaque fois apprécier sa plume délicate, sa poésie des mots, sa sensibilité. Ce sont à chaque fois des histoires qui me marquent, avec des personnages auxquels je peux m'identifier. Et cela n'a pas été autrement avec ce nouveau roman. 

Je suis tombée sous le charme du titre, à la lisière des vagues, quand on pense à ces vagues justement qui viennent laver le sable, ne peut-il en être autrement pour notre âme. On dit bien aussi qu'une vague d'émotions a déferlé sur nous, et c'est exactement ce que j'ai ressenti avec cette histoire. C'est celle de Mona. Elle a la cinquantaine, elle travaille, et partage la vie avec Franck, son mari qu'elle a rencontré il y a plus de trente ans, ils ont deux enfants, grands maintenant. Un matin, le monde de Mona s'écroule lorsqu'elle découvre une lettre de Franck sur la table de la cuisine. Il lui annonce qu'il la quitte et qu'il part. C'est un effondrement pour elle. Tout ce qu'elle a construit avec lui s'écroule, elle n'a plus de futur, plus de présent. Elle se sent dans un brouillard infini. Elle culpabilise, pense que c'est de sa faute s'il est parti, elle doute d'elle, et a un profond sentiment d'échec. Elle va partir, elle aussi, sur un coup de tête. Elle se retrouve en bord de mer, où elle va chercher à sortir de ce brouillard, analyser sa vie, son passé, et essayer d'envisager son futur, tout en se laissant submerger par ses souvenirs d'enfance et d'adolescence. 

Je me suis très vite attachée à Mona, c'est difficile de faire autrement, dès les premières lignes, je me suis retrouvée avec les événements qui secouent la vie de Mona. Je me suis beaucoup retrouvée en elle, surement parce que nous avons le même âge. Je me suis mise à sa place, et je n'ose même pas imaginer ce que deviendrait ma vie si mon mari, que j'ai moi aussi rencontré il y a plus de trente ans, venait à me quitter, sans raison aucune. Car c'est ce qu'il se passe avec Mona, elle ne sait pas pourquoi Franck est parti, et je pense que c'est le pire. Ne pas savoir la cause fait encore plus douter de soi, et culpabiliser. On se pose une tonne de questions, on se remémore chaque mot, chaque geste pour savoir lequel a fait pencher la balance. C'est tout ce que vit Mona. Il est vraiment très facile de s'identifier à elle. L'autrice le permet en tout cas très bien. Un tel événement peut arriver à toute femme et à tout âge, et la même remise en question se fera alors. C'est un véritable ras de marée dans ces cas là. C'est là que j'ai trouvé que le titre aussi collait très bien à l'histoire. En plus, Mona part quelques jours au bord de la mer, ce qui amplifie ce sentiment de roulis. J'ai aimé sa force à Mona, car il en faut pour surmonter ce qu'elle va vivre, pour se relever et pour continuer d'avancer. Elle m'a épatée par sa résilience et sa combattivité. C'est douloureux, mais elle montre à quel point l'être humain est capable de s'adapter et de rebondir, que du mauvais peut naitre aussi le meilleur. 

Béatrice Hammer écrit une très belle histoire de femme, un très beau portrait d'une femme qui se reposait sur ses lauriers parce qu'elle avait une stabilité de vie, et qui doit tout recommencer, se battre à nouveau, alors qu'elle aspirait juste à vivre tranquille. C'est un roman très intimiste, car l'autrice nous montre toutes les émotions de son personnage, toutes ses pensées, qui ramènent à notre propre vécu et nos propres sensations. La plume très sensible de l'autrice, sa délicatesse, son humanité et son empathie rendent Mona encore plus belle. J'ai eu l'impression que j'étais à la place de Mona, alors que la narration est à la troisième personne du singulier, ce qui me permet toujours de garder une petite distance avec le personnage. Là, je me suis vue dans Mona, et j'ai vécu son histoire aussi intensément qu'elle. L'autrice a très bien travaillé ses personnages, ses lieux, ses décors, l'atmosphère qui y règne. J'ai moi aussi senti l'iode marin, j'ai vu les vagues, j'ai ressenti la froideur de l'eau sur ma peau. C'est totalement immersif. Le livre n'est pas très long, un peu plus de cent cinquante pages, mais il est d'une telle intensité qu'il aurait pu être plus long, je ne m'en serais pas aperçue. 

La lecture est addictive, j'avais tellement envie de savoir ce qui allait arriver à Mona, que je lisais plus vite. Et en même temps, j'avais envie de faire trainer ma lecture pour rester encore un peu dans cette histoire. Les chapitres sont courts, ce qui rajoute du rythme à la lecture. Le style de Béatrice Hammer est toujours aussi bon, elle apporte plein d'amour à son texte, plein de bons sentiments. Elle parle très bien de la condition de la femme, de ce duel éternel entre sa vie privé et professionnelle, de son épanouissement. Elle aborde des sujets importants, qui font toujours débat à notre époque, j'ai l'impression que la femme sera toujours obligée de se battre pour obtenir ou garder ce qu'elle a réussi à obtenir. Vaste débat. Mais c'est à tout cela que j'ai pensé en refermant le livre, j'aime quand mes lectures me poussent dans mes retranchements, qu'elle m'oblige à me poser des questions sur moi-même. La lecture est alors tellement enrichissante. 

J'ai dévoré ce roman, je suis arrivée à la fin trop vite, j'aurais aimé faire durer le plaisir. Mais la fin est tellement belle. Je ne m'y attendais pas, mais ça va tout changer pour Mona. J'ai eu la sensation de quitter une amie, j'avais envie de lui souhaiter beaucoup de bonheur, alors que ce n'est qu'un personnage de papier. Elle m'a marquée et je pense que je ne l'oublierai pas de sitôt. 

Je vous recommande très fort ce roman. Si vous connaissez déjà Béatrice Hammer, vous serez contents de la retrouver. Et si vous ne la connaissez pas, n'hésitez surtout pas à le faire, avec ce roman, ou avec d'autres. Parmi ceux que j'ai lu d'elle, j'ai également beaucoup aimé "Les violons de Léna", mais "Cannibale Blues" ou "Ce que je sais d'elle" sont très bien aussi. De mon côté, je vais continuer à la suivre, et lirai sa prochaine parution. J'ai repéré un autre de ses roman, "Lou et Lilas", dont le résumé me tente beaucoup...affaire à suivre.

Il ne me reste plus qu'à remercier Béatrice Hammer pour cet excellent moment de lecture et pour toutes les émotions que j'ai vécues. Un grand merci également aux éditions d'Avallon pour leur confiance renouvelée en mon blog. 

 

Un échec, c'est comme une brûlure, une déchirure sectionnant un tissu, une blessure qui strierait la chair, une ride défigurant la peau. L’échec est signe que l’on est vieux. Car le jeune n’échoue pas, il apprend comment réussir. Le vieux n’apprend plus rien : le vieux ne recommencera pas.

S'il y a rarement plus d'une façon de réussir, il y a souvent de nombreuses manières d'échouer.

C'est peut-être pour cela qu'il est parti. Pour arrêter cette escalade. Parce qu'il a pressenti qu'au bout il n'y a rien, que le plus haut sommet qu'on peut atteindre n'est qu'un fossé boueux où l'on est enfermé, que personne ne devrait passer sa vie à grimper sans avoir de but.

Pas besoin d’être folle pour être libre.

Et si c’était une chance ? Se retirer du monde, sortir du cercle alors qu’on est encore vivante, que l’on peut encore faire un choix ? Et si c’était cela, vieillir ? Se dépouiller de la séduction vaine des hommes ? Peut-être était-ce une vraie bénédiction ? Abandonner la vanité avant qu’il ne soit trop tard, ne plus chercher à se lover dans les clichés, quitter le casino avant d’être ruinée ? Se consacrer à l’être, mépriser le paraître ?

C’est quand on manque qu’on veut créer.

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