La lune de l'âpre neige de Waubgeshig Rice

Publié aux éditions du Livre de Poche

Résumé :

Au nord du Canada, dans une petite réserve indienne anichinabée, on chasse et on collecte des vivres à l’approche de l’hiver. Lorsqu’une panne d’électricité générale survient, peu s’en émeuvent. Mais, au fil du temps, l’absence de moyens de communication avec l’extérieur et la diminution des stocks de nourriture font monter la tension. Le conseil de la tribu tente de gérer la situation. Des clans se forment. Puis des étrangers venus chercher refuge auprès d’eux sèment le doute. Le monde semble avoir sombré dans le chaos. L’affolement gagne du terrain. Les habitants comprennent que la plus grande menace vient de la communauté elle-même.

À propos de l'auteur :

Waubgeshig Rice est un journaliste et écrivain originaire de la réserve indienne de Wasauksing. Il a animé jusqu'en 2020 une émission périodique sur CBC. Il se consacre désormais entièrement à l'écriture.

Mon Avis :

J'ai lu ce livre dans le cadre du Prix des Lecteurs du Livre de Poche pour lequel il est sélectionné en mai dans la catégorie Polar. Je ne connaissais pas du tout ce livre et cet auteur avant ce prix, c'est une totale découverte pour moi. La couverture montre une image d'apocalypse et de vile détruite, le résumé me le confirme après lecture. Ce livre n'est pas un polar, ni vraiment un thriller, il y règne pourtant du suspense, je le classerais plutôt dans les romans noirs, proche du postapocalyptique. 

L'histoire se déroule au nord du Canada, dans une petite réserve indienne anichinabée. On est en automne, l'hiver approche, et les hommes de la colonie chassent et préparent les mois froids et enneigés. On fait la connaissance de l'un d'eux, Evan. Il vit avec Nicole et ont deux jeunes enfants. Il a chassé un orignal et le ramène chez lui pour le conserver en provisions. En rentrant, il constate qu'il y a une panne de courant. Rien d'alarmant pour ces gens qui ont l'habitude de ce genre d'ennuis, isolés comme ils le sont. Mais l'électricité ne revient toujours pas, et s'ajoute à cela une panne de téléphone et de réseau internet. La réserve se trouve coupée de toutes communications avec la ville. Le conseil se réunit, les générateurs sont démarrés pour garantir de la lumière et de l'eau chaude. La situation perdure, la population commence à paniquer, le supermarché est dévalisé, créant une sorte d'émeutes. Les hommes du conseil décident donc de rationner et de distribuer les réserves alimentaires au fur et à mesure afin de tenir le plus longtemps possible. Les jeunes scolarisés à la ville arrivent à revenir près des leurs, ils leur racontent alors ce qu'il se passe à l'extérieur de la réserve, et tout le monde comprend alors que ce qu'ils connaissent eux est en fait généralisé partout. La panique s'installe, l'inquiétude avec. Heureusement, Evan et d'autres hommes gardent leur sang froid pour que le calme revienne. Des étrangers vont arriver à la réserve, l'un d'eux est menaçant, et personne ne sait vraiment ce qu'ils veulent vraiment, trouver refuge ou les nuire. Tout devient de plus en plus compliqué pour ces gens. 

C'est un scénario de film ou série catastrophe que l'on n'aimerait surtout pas voir arriver dans la vie réelle. Le sujet a déjà été traité, je pense par exemple au film "Le jour d'après", mais ce que j'ai trouvé ici intéressant, c'est que cela se passe au sein d'une réserve indienne. Je trouve que ce peuple a des ressources en eux beaucoup plus fortes que les autres personnes. Même si le progrès a fait qu'ils vivent une vie comme tout le monde, ils ont su garder leurs racines et leurs coutumes d'autrefois. Et celles-ci refont surface avec ce genre de drame. Ceci dit, on se rend bien compte que la jeune génération, elle, a par contre beaucoup de mal à faire face au manque. Ce drame va mener à un retour aux sources de ce peuple, avec une façon de vivre plus proche de celle qu'il connaissait autrefois, où il était plus en connexion avec la nature, où les besoins étaient surtout vitaux et pas superficiels comme la télé ou les jeux vidéos. Cela m'a fait penser au confinement de 2020, où, même si nous ne connaissions pas de restrictions alimentaires ou autres, nous faisions alors plus attention à la nature qui nous entourait. Je trouve que cela a très vite disparu. 

Les personnages sont attachants. On suit plus particulièrement Evan et sa famille, mais j'ai aimé tous ceux qui faisaient partie de la réserve. L'auteur est lui-même originaire du même peuple, c'est pour cela qu'il en parle aussi bien. Et cela rend le tout très instructif. J'ai aimé apprendre à connaitre leurs coutumes, leurs légendes, leurs façons de vivre. Cela crée un récit très réaliste. L'auteur fait monter le suspense petit à petit. Plus j'avançais, et plus je me demandais s'ils allaient s'en sortir, s'ils allaient arriver à atteindre le printemps. Il y a cependant certains faits qui restent un mystère, et j'ai trouvé que la fin allait un peu trop vite à mon goût. Le livre est construit en trois parties, qui suivent les saisons, l'automne, l'hiver, le printemps. Mais le final donne l'impression qu'il y aura une suite. Pourtant après recherche, j'ai bien vu que l'auteur devait paraitre un second livre, mais qu'il serait plus question des raisons de la panne et des perturbations. Je ne suis pas sûre de revoir les personnages. Cela devrait sortir à l'automne 2024, je vais rester à l'affut. 

J'ai été tout de même agréablement surprise par ce roman. Je ne pensais pas qu'il allait autant me plaire et qu'il allait se lire aussi vite. Le rythme est assez lent au début, s'accélérant par la suite, l'histoire est dense, le style de l'auteur est très fluide, les descriptions ne sont pas lourdes. Il a abordé de nombreux sujets très intéressants, j'ai appris plein de choses sur ce peuple, sa façon de vivre, le respect qu'ils ont envers les animaux qu'ils tuent, leurs rites, c'est vraiment une histoire très enrichissante pour tout cela. J'ai beaucoup aimé la signification du titre. La lune de l'âpre neige a un double sens selon les légendes, soit elle se rapporte au pic de l'hiver, quand la neige se solidifie à la surface à cause du froid intense, ou soit c'est la période un peu plus tard dans l'année, quand la météo alterne entre le froid et le redoux, entrainant une brusque congélation de la neige. Je connais ce phénomène pour l'avoir vu dans les montagnes où j'habite, lors d'hivers rigoureux, mais je ne connaissais pas le nom qu'on lui donnait, et j'ai trouvé cela très instructif. 

Je suis très contente d'avoir découvert cet auteur, je le note dans mes auteurs à suivre. Il est journaliste, et on sent sa précision dans sa façon d'écrire, et son côté anichinabé dans sa manière de raconter une histoire, comme une légende indienne. J'ai déjà hâte que le second livre sorte, j'ai très envie de découvrir les causes de cette apocalypse. 

Je ne peux que vous conseiller ce livre, pour son sujet, pour le peuple qui y est mis à l'honneur, pour la plume de l'auteur, et pour le suspense qui règne tout le long. 

Il ne me reste plus qu'à remercier le Livre de Poche et son prix des lecteurs de m'avoir permis de faire cette belle découverte. 

La Lune de l'âpre neige

Au nord du Canada, dans une petite réserve indienne anichinabée, on chasse et on collecte des vivres à l'approche de l'hiver. Lorsqu'une panne d'électricité générale survient, peu s'en émeu...

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