Yoga de Emmanuel Carrère
Publié aux éditions POL
Résumé :
C'est l'histoire d'un livre sur le yoga et la dépression. La méditation et le terrorisme. L'aspiration à l'unité et le trouble bipolaire. Des choses qui n'ont pas l'air d'aller ensemble, et pourtant : elles vont ensemble.
À propos de l'auteur :
Emmanuel Carrère a reçu le prix Femina pour La Classe de neige (1995), le prix des lecteurs de L'Express pour D'autres vies que la mienne (2009), le prix Renaudot pour Limonov (2011) et le prix Le Monde pour son livre, Le Royaume (2014).
Mon Avis :
C'est le premier livre de Emmanuel Carrère que je lis, et pourtant il a une bibliographie bien remplie, mais je n'avais pas eu encore l'occasion de sauter le pas. C'est chose faite avec son dernier roman. Pourquoi j'en suis venue à le lire, parce que je suis tombée sur une interview de lui dans le magazine Lire et ses réponses m'ont intriguée et m'ont donné envie d'en savoir plus, d'en apprendre plus sur lui et sur les années qu'il relate. Cela commence en janvier 2015 pour s'achever, on suppose, fin 2019.
Ce roman est écrit comme un journal intime où l'auteur se confie sur ses pensées. Il voulait au début écrire un roman sur le yoga, comme il dit, "un petit livre souriant et subtil sur le yoga" car il doit commencer une retraite de méditation dans le centre de la France où il va passer dix heures par jour à méditer, dans le silence le plus complet. Donc l'idée première de ce roman était de raconter son approche du yoga, ses bienfaits, ainsi que ceux de la méditation et relate son expérience de stage de méditation. Il se veut être différent de tous les livres sur la méditation qui peuvent déjà exister sur nos rayons de librairies et bibliothèques. Il parle de son expérience à lui, cela fait une trentaine d'années qu'il pratique le yoga et également le Tai-chi, son expérience est donc assez grande pour pouvoir donner son ressenti sur le sujet.
Il narre donc ses journées au sein de ce⁰ centre de stage, assis sur son zafu, entièrement immobile, concentré sur sa respiration, sur son inspiration et son expiration. Sur le silence qui règne aussi, il est interdit de parler, même les repas se font dans le plus grand silence, les participants ne se côtoient pas, les hommes sont séparés des femmes. Et tout ceci pour être plus à l'écoute de soi. Les téléphones portables, ou tout autre ordi ou tablette, sont interdits. Il est également interdit de prendre des notes. Tout est entièrement consacré à un retour sur soi, sans aucune distraction que ce soit. Cela paraît vraiment très dur vu de l'extérieur, mais c'est le principe des stages de méditation ou de travail sur soi.
Il ne mènera pas ce stage jusqu'au bout de ses trois semaines. Nous sommes en janvier 2015, une date synonyme de l'attentat à Charlie Hebdo. Emmanuel Carrère va être touché par le décès d'un proche, un ami, Bernard Maris. Il avait fait sa connaissance par l'intermédiaire de sa compagne. Celle-ci souhaite que Emmanuel Carrère prononce un discours lors de l'enterrement de son compagnon. Ce que fera Emmanuel Carrère, et pour cela, il devra écourter son stage.
Arrivé à ce stade, on a déjà lu la moitié du livre. Une moitié très intéressante et prenante. La suite est tout aussi intéressante, car cet homme que je pensais être solide au vu des heures qu'il peut passer à méditer, je vais le voir s'écrouler et tomber dans une crise de folie qui va lui valoir une hospitalisation et des soins lourds, qui vont aller jusqu'aux électrochocs. Il va nous parler de sa descente aux enfers avec une extrême sensibilité, et de sa "guérison" ou plutôt de son retour dans le positif. Emmanuel Carrère souffre de bipolarité et de troubles qui le font soit plonger dans une noirceur extrême ou dans un état d'euphorie exagérée. Son traitement mis en place lui fera aller mieux. Et on le suivra après son hospitalisation lorsqu'il part en Grèce aider de jeunes migrants.
On va le suivre ainsi sur une période assez longue de sa vie, en plus du présent, il remontera souvent dans le passé pour raconter ce qu'il a vécu avant, pour mieux expliquer les conséquences sur sa vie présente. Le suivre ainsi dans ses différents états de quiétude, de tumultes, de réflexions a été très instructif et intéressant. On est dans de l'introspection profonde, il ne se cache pas, révèle tout sur lui, cela peut sembler parfois un peu présomptueux de sa part, mais il se livre entièrement sans fard, sans se cacher. Les thèmes de son roman sont repris dans la quatrième de couverture, le yoga, la méditation, le terrorisme, la dépression les troubles bipolaires, et je rajouterais l'amour aussi avec un grand A, et la crise des migrants. Il parle de vraiment beaucoup de choses, de valeurs, et il montre très bien que tout va ensemble, que tout est lié, que pour tout le mal qu'il y a, le bien est présent aussi... le yin et le yang...
Je ne connaissais pas encore Emmanuel Carrère, comme je l'ai dit plus haut, et je suis contente d'avoir fait cette découverte. J'ai aimé son style, où l'on sent un homme cultivé et en même temps simple dans son écriture, elle est à la fois très littéraire et très accessible pour chacun de nous. Pas de prise de tête, ça coule tout seul, ça se lit tout seul, j'étais étonnée d'avoir lu cent pages en peu de temps, et pourtant il n'y a pas de dialogue, mais son style est tellement aéré, fluide que les phrases défilent sans s'en rendre compte. Le livre est séparé en cinq parties, reprenant ses cinq étapes principales de ces presque cinq années. Même lorsqu’il s’agit de scènes intimes, il n'est pas vulgaire et décrit ces moments de sexe avec une grande sensibilité et douceur.
J'ai beaucoup aimé cette lecture, mon seul point négatif irait à la fin qui n’en est pas tellement une, comme si l'auteur en prévoyait une suite. Mais à part ça, je n'ai pas du tout été déçue. Un livre très intime comme celui-ci pourrait montrer un auteur nombriliste, égoïste ou trop présomptueux. Mais non, Emmanuel Carrère se montre ici honnête, très sensible, il ne cache rien, le bien comme le mal de ce qu’il peut ou a pu être, il est tout simplement vrai, il se montre comme tout le monde pourrait être. J'ai connu la dépression, les hospitalisations, je me suis réfugiée dans la méditation par la suite…ce que je veux dire par là, c’est que je me suis souvent retrouvée dans ce qu’il relatait, la méditation fait beaucoup de bien, je ne la pratique pas assez et c’est bien dommage…elle permet de retrouver une plénitude intérieure qui fait beaucoup de bien dans ce monde hyper stressé. Une lecture vraiment très intéressante et authentique.
Comme je le disais plus haut, je suis contente d'avoir découvert Emmanuel Carrère et cela me donne très envie de découvrir ses autres romans. Il en a tout de même écrit quatorze, tous édités aux éditions POL. Il rend d’ailleurs un très bel hommage à son éditeur, décédé en 2018. Je trouve cette fidélité entre un écrivain et son éditeur tellement belle. Je lirais donc sûrement d'autres romans de cet auteur, je vais le suivre de près pour être au courant de ses prochaines parutions et lire également les précédentes. En tout cas, je ne peux que vous conseiller ce roman, d'une très belle écriture, d'une extrême sensibilité, authentique et en même temps très positive. L'auteur montre une très belle résilience, et cela peut être très inspirant pour des personnes ayant vécu la même maladie, en tout cas ça l'a été pour moi, j'ai très envie de me remettre à la méditation, une résolution à prendre en ce moment de la nouvelle année.
J'ai emprunté ce livre à ma médiathèque, mais je me l’achèterai sûrement pour l'avoir dans ma bibliothèque afin de pouvoir relire certains passages avec des phrases très inspirantes. Un grand merci à Emmanuel Carrère pour cette très bonne lecture
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C'est l'histoire d'un livre sur le yoga et la dépression. La méditation et le terrorisme. L'aspiration à l'unité et le trouble bipolaire. Des choses qui n'ont pas l'air d'aller ensemble, et pou...
http://www.pol-editeur.com/index.php?spec=livre&ISBN=978-2-8180-5138-2