Cannibale blues de Béatrice Hammer
Publié aux Éditions d'Avallon
Résumé :
Il s'appelle Ramou. Il est français. Il a 24 ans. Plein d’enthousiasme et de naïveté, il débarque un beau matin dans un petit pays d'Afrique où il doit enseigner pendant deux ans l'économie générale à l'Institut Polytechnique.
Il s'appelle Joseph. Il va devenir son boy. Sur la colline, on murmure qu'il a trop de diplômes pour faire ce métier-là, et qu'il travaille peut-être pour la Sûreté. Ce qui est sûr, c'est qu'il a un secret...
Un portrait féroce du petit monde des expatriés, plein d'ironie et de bonne humeur.
À propos de l’auteure :
Béatrice Hammer est romancière, scénariste et réalisatrice. Elle a publié une quinzaine d'ouvrages, qui lui ont valu régulièrement le prix des lecteurs notamment le prix Goya, le prix Tatoulu et le prix Livre mon ami.
Cannibale blues, son plus grand succès, a été la sélection Attention Talent des libraires de la FNAC. Une baignoire de sang, son premier polar vient de sortir aux éditions Alter Real.
Mon Avis :
Avec ce roman, je fais une double découverte. Celle d'une auteure déjà, je ne connaissais pas du tout Béatrice Hammer, bien qu'elle ait déjà écrit quelques romans. Et celle d'une toute jeune maison d’édition, qui a déjà un catalogue de titres bien intéressants. Et surtout, ce qui m'a beaucoup plu chez eux, c’est que c’est une équipe de bénévoles qui reversent tous les bénéfices des ventes à leurs auteurs. Je trouve que c’est vraiment très bien et que ça mérite qu'on s'attarde sur leurs publications.
Ce roman m'a emmenée en Afrique. On va y suivre Philippe Ramou il arrive à l’aéroport, il doit passer deux ans dans ce pays en tant qu'enseignant dans une université. Il est accueilli par Joseph, qui va devenir son homme à tout faire, un « boy » comme on dit là-bas. Philippe a beaucoup de mal à intégrer cette notion d'avoir un homme qui vous fasse tout dans la maison, le ménage, la lessive, les repas. Petit à petit s'installe pour Philippe une belle amitié avec Joseph. Mais celui-ci n'est pas tout à fait là par hasard, on va le découvrir petit à petit. Philippe va devoir s’intégrer à la vie et aux coutumes. Ses élèves ne sont pas faciles avec lui, il nouera des relations amicales avec certains de ses collègues, et éprouvera une forte attirance pour une femme africaine, Généreuse de son petit nom. Elle aussi, on comprendra vite qu'elle mène un double jeu quand on la verra parler avec Joseph et qu’elle a un autre prénom. Que peuvent-ils bien cacher, c’est tout ce qu'on essaiera de savoir tout au long des pages.
J'ai beaucoup aimé suivre Philippe dans son installation en Afrique, sa découverte des us et coutumes du pays, les plats, les danses, les soirées entre ceux qui sont expatriés et ceux qui sont nés dans ce pays. On se rend bien compte du choc des cultures, et aussi que l'homme blanc a bien souvent gardé son envie colonisatrice sur l'homme noir natif de cette terre. L'histoire se déroule entre 1984 et 1986, on retrouve alors certaines façons de vivre de cette époque, pas de téléphone portable, pas d’internet comme on le connait aujourd’hui, les échanges se font par courrier. D'ailleurs, Philippe écrit très souvent à sa fiancée, Juliette, restée en France. Elle le rejoindra pour la deuxième année, et les petits dépassements qu'a fait Philippe pendant sa première année devront alors être assumés.
Autour de Philippe, il y a d'autres personnages tout aussi intéressants, parfois très extravagants, je pense notamment au couple Durrouchoux, il y a aussi Betty, la collègue américaine qui en pince pour Philippe, le directeur de l'Institut où Philippe travaille, Bonaventure. Il y a aussi le père Francis, toujours de bons conseils pour le jeune français. Et d’autres encore qui passent presque inaperçus au début et qui pourtant auront un rôle important à jouer. Des personnages très hétéroclites aux valeurs différentes, qui ne se concordent pas toujours qui vont évoluer autour du personnage principal et de Joseph. Car celui-ci a une place très importante dans ce livre. La place de personnage principal est tenue par ces deux personnes, Philippe et Joseph.
D'ailleurs, la narration est double, et j'ai beaucoup aimé cette originalité. Les chapitres alternent entre Joseph et Philippe. Joseph nous parle de Philippe essentiellement, de ce qu'il fait, avec qui il est, il va aussi petit à petit se confier, parler avec Généreuse et lui expliquer pourquoi il est là. Et d'autres chapitres sont tenus par Philippe, qui écrit sur un cahier ce qu'il se passe dans sa vie depuis son arrivée en Afrique. Il y a aussi des échanges de lettres avec sa petite amie restée en France. Ces deux aspects de narration sont très bien faites et permettent d'avoir plusieurs points de vue sur une même situation. Et plus les pages se tournent, et plus on a envie de savoir ce que cache Joseph. Les informations sont distillées au compte goutte. On se doute petit à petit que Joseph n'est pas arrivé dans la vie de Philippe au hasard, et savoir pourquoi est tout l'enjeu de cette lecture.
Du fait des écrits sur le carnet, ou des échanges épistolaires ou encore de ce que Joseph raconte, on est souvent avec un choix narratif que j'affectionne tout particulièrement, la première personne du singulier. Je suis très sensible à ce « je » qui me permet de me mettre à la place du personnage qui parle, de rentrer dans sa tête et de savoir au plus près le moindre de ses sentiments. Et là, j'ai pu rentrer dans la peau de deux personnages différents, un homme blanc venant d’Europe ou un homme noir du continent d’Afrique. Chacun avec leurs traditions, leurs façons de voir la vie qui est bien souvent différente. Philippe apprendra beaucoup aux côtés de Joseph et était parfois loin de s'imaginer tout ce qu’est Joseph au plus profond de lui.
Je me suis ainsi très vite attachée à ces deux hommes, autant l'un que l'autre. Ils m'ont tous les deux touchée. L'auteure profite d'ailleurs de cette histoire pour faire passer de beaux messages et de belles valeurs, et elle profite aussi pour montrer du doigt des travers qui existent d'ailleurs toujours. Elle parle du racisme, de l’intégration dans la société, de la culture des Africains, du comportement de certains Européens qui considèrent encore trop souvent ce peuple comme des êtres inférieurs. Leur éducation est aussi un sujet important. Il est toujours bon de rappeler certains travers des humains entre eux, tout ça pour une différence de couleur de peau. Il n'y en a pas un de supérieur à l'autre, on est tous égaux, et c’est ce qu'essaye, pour moi, de dire l’auteure.
Et tout cela est emmené par un très bon style de l’auteure qui, à été un peu déroutant au début mais auquel j'ai très vite adhéré. En effet, les dialogues n'existent pas, ils sont insérés dans les paragraphes de récit, pas de tiret, quelques fois un retour à la ligne, mais pas de démarcations comme on a l’habitude de le voir. J’ai beaucoup aimé cette façon de faire. Et j'ai également apprécié l'humour parfois mordant et ironique de l'auteure. Certains personnages sont très cocasses et leur originalité amène des scènes parfois excentriques et qui ne peuvent que faire sourire. Ces moments plus légers donnent des moments de récréation dans la lecture qui sont toujours les bienvenus. J'ai aimé le ton parfois acide, pour montrer les choses comme elles sont, ça peut déranger mais c’est tellement vrai.. Les sentiments sont bien retranscrits, les décors sont très bien décrits sans alourdir pour autant le texte. L'auteure a très bien su dépeindre les lieux, dépaysant ainsi le lecteur, j'ai fait un très beau voyage rythmé au tempo de l'awulé, mais aussi avec les odeurs et les goûts des mets, et de ce fameux Cannibale blues, un cocktail très fréquemment servi. Toute une palette de couleur, de senteur et de goût se mêlent à la lecture, pour mon plus grand plaisir.
Je crois que je vais arrêter mon bavardage, une fois de plus, je me laisse emporter mais j'ai tellement aimé cette lecture que j'aimerais beaucoup vous donner envie de la lire. J’ai traversé plein de sentiments, du sérieux au plus drôle et l'auteure a mené son suspense avec brio jusqu’à la fin. Je ne m’attendais pas forcément à cela, j'aime bien être surprise dans les fins de romans, aller vers des chemins insoupçonnés.
La lecture s'est faite rapidement, ça se laisse lire tout seul, elle est rythmée par l'alternance des chapitres, mais aussi par l'action, Philippe se met parfois dans de drôles de situations et on se demande comment il va s'en sortir, et surtout il y a ce suspense autour de Joseph, on se pose la question de qui il est vraiment et de ce qu'il cache. Des faits réellement addictifs, qui donnent envie de savoir.
Je suis vraiment très contente d'avoir découvert Béatrice Hammer, j'ai vu qu'elle avait publié un roman aux éditions Alter Real, Une baignoire de sang, je suis très tentée de le lire pour conforter ma bonne impression de cette auteure. De toute façon, je la note dans mes auteurs à suivre.
En tout cas, je ne peux que vous conseiller ce roman, très dépaysant et divertissant. Et de découvrir également une nouvelle maison d’édition, c’est toujours bon de la soutenir. Elle a publié d'autres romans, dans le même genre, suspense ou fantastique, je vais sûrement lire certaines de leurs parutions. N’hésitez pas à les découvrir.
Je remercie Béatrice Hammer pour ce très bon moment et cette très bonne lecture, et un grand merci également aux Éditions d'Avallon qui m'ont contactée via la plateforme Simplement Pro, cela aurait été dommage de ne pas les découvrir.
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Il s'appelle Ramou. Il est français. Il a 24 ans. Plein d'enthousiasme et de naïveté, il débarque un beau matin dans un petit pays d'Afrique où il doit enseigner pendant deux ans l'économie g...
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