La cave aux poupées de Magali Collet
Publié chez Taurnada Éditions
Résumé :
Manon n'est pas une fille comme les autres, ça, elle le sait depuis son plus jeune âge.
En effet, une fille normale ne passe pas ses journées à regarder la vraie vie à la télé.
Une fille normale ne compte pas les jours qui la séparent de la prochaine raclée monumentale…
Mais, par-dessus tout, une fille normale n'aide pas son père à garder une adolescente prisonnière dans la cave de la maison.
À propos de l'auteure :
Née en 1972 à Colombes, Magali Collet est une passionnée des mots. Elle écrit des poèmes, des nouvelles et des chroniques depuis de nombreuses années. Sa sensibilité à la cause des femmes, celles qui souffrent de ne pouvoir échapper à leur condition, apparaît en filigrane dans tous ses textes. Avec son premier roman, La Cave aux poupées, elle plonge ses lecteurs dans les fosses ténébreuses des âmes, pleines de violences, d'angoisses, mais aussi d'un profond désir de rédemption.
Mon Avis :
Je sais que je vais me répéter et que mes chroniques à propos d'un roman publié par Taurnada commencent toutes un peu de la même façon. Mais cette maison d'édition porte bien son nom. Chaque livre est une mini-tornade, je ne sais pas comment fait Joël Maissa et son équipe, mais ils ont l'art pour dénicher de petites pépites, toutes aussi stressantes les unes que les autres et surtout très variées. Les sujets changent à chaque fois, j'ai lu quasiment tous leurs romans, et je n'ai jamais rencontré le même thème. Mais pour toutes, j'ai toujours été prise dans ma lecture avec un livre très difficile à lâcher avant d'en voir arriver la fin.
Et ce roman ne va pas faire exception à la règle Taurnada. C'est le premier roman qu'écrit Magali Collet, et elle a plutôt réussi son pari. J'étais déjà rentrée dans la tête de tueur ou de psychopathe, mais alors jamais dans la tête d'un personnage tel que celui que j'ai rencontré dans cette histoire. Manon est une jeune femme de 22 ans, qui a l'esprit d'une jeune de 12/13 ans. Il faut dire qu'elle n'est jamais sortie de sa maison, n'est jamais allée à l'école, n'a toujours connu que sa mère ou son père, et encore, sa mère est morte lorsqu'elle était très jeune. Ah si, elle connait aussi les filles que ramène son père, elles vivent à la cave où le père a fabriqué deux cellules. Ce sont des filles très jeunes aussi, encore adolescentes. Manon s'occupe d'elles et de la maison, elle fait le ménage, prépare à manger pour son père, mais aussi pour les filles de la cave, elle les lave, les nourrit, les regarde vivre. Elle ne leur parle pas, elle n'a pas le droit. Jusqu'à Camille, avec qui elle ne respectera pas les règles imposées par le père. Avec elle, va naitre une autre sorte de relation, Manon va se confier à elle, Camille va lui apprendre certaines bases. Mais il ne faut pas que le père le sache où Manon recevra les coups qu'elle a l'habitude de recevoir. Arrivera-t-elle à sauver Camille, ou continuera-t-elle à obéir à son père...c'est la question que l'on va se poser tout le long.
Une telle histoire remue et ne peut pas laisser indifférent. On se dit qu'on ne peut pas s'attacher à de telles personnes qui sont ni plus ni moins que des bourreaux. Et pourtant, plus je lisais, et plus je m'attachais à Manon. Bien sûr, elle suit aveuglément ce que lui ordonne son père, elle prépare les filles pour le soir où son père doit les « monter », pour elle, tout est normal. Et c'est à cause de cela justement qu'on ressent de l'empathie pour elle, on se rend très vite compte qu'elle n'a rien connu d'autres que les coups, l'obéissance et l'asservissement. Pour elle, tout cela est « normal ». Elle a des doutes quand elle voit les feuilletons de la télé, mais elle est tellement habituée à cette situation qu'elle ne voit vraiment pas où est le problème. En plus, si elle fait quelque chose que son père ne veut pas, elle sait qu'elle va se faire cogner, que son père s'en prendra à elle aussi. La pauvre gamine, elle n'aura pas eu une enfance facile. Même quand elle a la possibilité de trouver du réconfort dans un petit être, son père lui arrache.
Par contre, j'ai sincèrement détesté celui qui tient le rôle de son père. Difficile d'en être autrement. Impossible de ressentir quoique ce soit ou de trouver une excuse à ce pédophile, violeur et violent. J'ai eu envie plus d'une fois que quelque chose lui arrive, une fille qui se rebelle, mais il est fort et costaud, vit dans une maison reculée et isolée, rien ni personne ne peut venir contrarier ses habitudes malsaines. À moins que...et là, j'ai trouvé que l'auteure avait eu une bonne idée et surtout une bonne imagination. Je ne voyais pas comment allait pouvoir se terminer cette histoire. Elle n'épargne pas ses personnages, les fait souffrir, et j'ai eu très souvent peur pour eux. Tous les sentiments y passent, j'ai ressenti un extrême dégoût pour le père et pour ses actes, et en même temps de la pitié pour Manon. Et pourtant, ses faits et gestes ne devraient faire ressentir aucune compassion vis-à-vis d'elle.
Il faut dire aussi que l'attachement et l'empathie envers Manon sont renforcés par le choix narratif de l'auteure, puisqu'elle a employé la première personne du singulier pour raconter. Ce « je » permet ainsi de se retrouver dans la tête de la jeune fille, de ressentir toutes les émotions qui la traversent, de permettre de la comprendre. C'est parfois très difficile d'être à sa place quand elle parle de ce que fait son père aux filles et que pour elle, tout lui semble normal. J'ai eu plus d'une fois l'envie de lui ouvrir les yeux et lui expliquer qu'il y a rien de normal à tout cela. Le choix de ce style narratif est judicieux de la part de l'auteure, car il nous plonge carrément au plus près des sentiments de Manon et de l'horreur. Si elle avait employé la troisième personne du singulier, cela aurait créé une distance qui n'aurait pas fait vivre la même expérience au lecteur.
Quant au style, il est très bon, et complètement en adéquation avec le personnage de Manon. Les phrases sont parfois tournées bizarrement, les mots ne sont pas toujours très recherchés, mais c'est tout à fait logique, la narration est faite par la jeune fille qui n'est jamais allée à l'école, qui parle de la même façon que son père, elle n'a reçu aucune instruction. Il était donc tout à fait nécessaire que l'auteure emploie une telle façon d'écrire. Ça rajoute d'ailleurs encore une dose de réalisme à tout l'ensemble. Et ça m'a fait plus d'une fois froid dans le dos.
Je ne vous parle pas en détails de ce qu'il se passe, à vous de le découvrir, ce serait vraiment trop dommage de vous gâcher la surprise au moment de la lecture. Mais je peux vous assurer que jamais vous ne pourrez imaginer tous les événements qui ont lieu. Il faut parfois avoir le cœur bien accroché. Et pourtant, comme je le disais plus haut, le fait que ce soit raconté par Manon, et quelque part banalisé, « normalisé », cela rend la lecture facile et moins horrible. La fin m'a surprise, je ne pensais pas qu'on allait arriver à cela. En fait, c'est le genre de roman où j'ai du mal à m'imaginer une fin, soit elle est heureuse et on se demande comment tout peut virer d'un coup, soit elle est malheureuse et on trouve que c'est la suite logique de tout le reste. Là, je n'avais pas penser à ce choix, et c'est plutôt agréable de se faire surprendre ainsi jusqu'à la dernière page.
La lecture s'est faite très rapidement, les chapitres sont courts, donnant beaucoup de rythme. En plus, j'avais tellement envie de savoir ce qui allait bien pouvoir se passer, que j'ai eu du mal à quitter ma liseuse. Le sommeil a eu raison de moi, mais je me suis vite replongée dedans une fois réveillée. Je ne suis pas prête d'oublier Manon et cette cave. Une histoire terrible, inimaginable, et surtout qu'on espère qui n'existe nulle part. Malheureusement, rien n'est moins sûr.
Je ne peux que vous recommander la lecture de La cave aux poupées. Préparez-vous à lire une histoire intense, prenante, déstabilisante et remuante. Un livre impossible à oublier. J'espère sincèrement que Magali Collet écrira un autre roman. En tout cas, je vais la suivre de près, car elle ne manque pas d'imagination.
Un grand merci à elle pour tout ce qu'elle m'a fait vivre pendant la lecture de son roman, et un grand merci à Joël des éditions Taurnada pour sa confiance renouvelée à chaque nouvelle parution. Si vous ne connaissez pas encore cette maison d'édition et que vous aimez le thriller, n'hésitez plus une seconde, je n'ai jamais été déçue.
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La Cave aux poupées - Magali Collet
Magali Collet Manon n'est pas une fille comme les autres, ça, elle le sait depuis son plus jeune âge. En effet, une fille normale ne passe pas ses journées à regarder la vraie vie à la télé....