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Marie-Nel lit

De la part d'Hannah par Laurent Malot

12 Février 2020 , Rédigé par Marie Nel

De la part d'Hannah par Laurent Malot

Publié aux éditions Le Livre de Poche

 

 

Résumé :

 

«Tu es en train de grandir, Hannah, ça n’est jamais facile.
- Ça fait bientôt onze ans que je grandis ! Je vois pas pourquoi ce serait plus difficile aujourd’hui.
- Parce que tu n’as pas une vie normale.
- Une vie normale, c’est si maman était pas morte ?
- C’est ça. Si tu avais vécu avec ta mère et si ton père avait su l’aider.
Elle a un peu pâli et je me suis demandé si elle regrettait pas d’en avoir trop dit.
- L’aider à quoi ?»

Hannah a dix ans et un caractère bien trempé. Elle vient de passer trois ans dans un sanatorium, lorsque, du jour au lendemain, on décrète qu’elle n’est plus malade et doit rejoindre son petit village de Dordogne. À La Chapelle-Meyniac, les cancans des mégères vont bon train. Hannah s’en méfie. En 1961, en pleine guerre d’Algérie, les blessures de la Seconde Guerre mondiale ne sont pas cicatrisées. Rien de pire que les rumeurs, surtout lorsqu’elles concernent votre mère…


 

À propos de l'auteure :


 

Né en 1970, Laurent Malot écrit depuis l’enfance. Il aime vagabonder entre les genres, notamment la littérature, le roman jeunesse, le roman policier et le thriller, et tremper sa plume dans les formes les plus diverses : pièces radiophoniques, pièces de théâtre, romans et scénarii.


 


 

Mon Avis :


 

C'est le deuxième roman que je lis de la sélection de février pour le Prix des Lecteurs du Livre de Poche. J'avais vu passer ce roman sur les réseaux sociaux lorsqu'il était sorti en grand format aux éditions Robert Laffont. Le résumé m'avait intriguée et j'avais envie de découvrir l'histoire d'Hannah.


 

Et la découverte fut bonne. J'ai aimé cette petite Hannah, une petite fille de 10 ans. On est en 1961, Hannah est dans un sanatorium dans les Pyrénées car elle est atteinte de tuberculose, enfin c'est ce qu'on lui dit depuis trois ans. Convoquée un matin par les médecins, elle apprend qu'elle est guérie et qu'elle va quitter le centre pour rejoindre son domicile. La surprise est de taille pour elle. Elle rejoint donc son petit village, situé en Dordogne, où elle vit avec son père chez son grand-père. Sa mère est partie lorsqu’elle avait deux ans et n'a jamais redonné de nouvelles depuis. Elle va retourner à l'école, se faire de nouveaux amis, elle va devoir apprendre à se réintégrer à tout ce monde. Comme dans tout village, les commérages vont bon train. Une maison close vient d'ouvrir, rien de tel pour alimenter les langues de vipère. Hannah va faire les frais de ces paroles, elle ne connait pas l'histoire de sa mère, elle va l'apprendre justement à cause de mauvaises paroles prononcées et elle cherchera à apprendre la vérité.

Au fur et à mesure qu'on avance dans le livre, on en apprend un peu plus sur Hannah et son histoire familiale. En plus, on est dans un contexte politique difficile, avec la guerre d'Algérie qui fait rage, le père d'Hannah ne voudra pas y partir. En 1961, on n'est pas loin de la fin de la seconde guerre mondiale, les conséquences de celle-ci se font encore sentir dans le pays, les Allemands ne sont pas appréciés, et les Juifs non plus, à qui certains reprochent justement la guerre. Pas facile pour une petite fille de grandir dans une telle atmosphère, surtout quand les rumeurs qu'on entend concernent votre propre mère.


 

Hannah est une petite fille pleine de dynamisme, comme beaucoup d'enfants de cet âge. Elle est insouciante, mais les épreuves de la vie l'ont déjà rendue mature dans sa façon de penser. Sa quête de vérité est loin d'être facile avec un grand-père qui parle peu et une grand-mère qui esquive les questions. C'est comme ça qu'elle va apprendre des choses via la parole des autres et celle-ci n'est pas toujours bienveillante.

J'ai beaucoup aimé suivre cette fillette et j'ai apprécié les thèmes abordés par l'auteur dans ce livre. Des thèmes importants qui méritent toujours d'être cités dans un roman, pour ne pas oublier les faits historiques, pour comprendre la réaction des gens vis-à-vis d'eux. J'ai aussi aimé les autres personnages, les grands-parents d'Hannah, sa copine Sarah, ils amènent du relief à l'histoire, ont chacun leurs problématiques. J'ai aussi apprécié la façon dont Laurent Malot parle de la société, et surtout de la vie des habitants d'un village dans les années 60. On commence à sentir le changement de comportement des gens, leur désir de liberté, de bouleverser les vieux schémas. L'auteur appuie aussi sur les rumeurs et les dégâts qu'elles peuvent faire, surtout chez les enfants, qui entendent plusieurs sons de cloches, les parents qui bien souvent à cette époque ne leur expliquaient rien et leur disaient souvent qu'ils comprendraient quand ils seraient plus grands. De quoi bien alimenter l'imaginaire des enfants qui se font alors des films parfois plus graves que la vérité.


 

L'attachement à la fillette se fait vite, grâce au choix narratif de l'auteur. Il a employé la première personne du singulier pour raconter l'histoire. Ce « je » permet ainsi de se mettre mieux à la place du personnage principal, de ressentir au plus près ce qu'elle vit et de connaître la moindre de ses pensées. C'est un procédé que j'aime beaucoup retrouver dans les romans. Il rend le climat de la narration plus intimiste. Mon seul bémol, ce serait la manière de parler d'Hannah. L'auteur emploie l'argot, il fait parler Hannah avec une gouaille digne des films de Michel Audiard. Cela ne me gêne généralement pas dans mes lectures, je trouve même que ce style apporte une dose d'humour et permet de dédramatiser des scènes plus tristes. Mon seul souci ici, c'est que j'ai trouvé que c'était un peu trop pour une fillette de dix ans au début des années 60. J'aurais plus vu à la place d'Hannah un garçon d'une quinzaine d'années vivant en ville. Le langage est beaucoup plus typé « ville » que campagne. Je n'arrivais pas à m'imaginer de telles phrases et de tels mots dans la bouche d'une petite fille, ce qui, du coup, ne me permettait pas de la visualiser. Je pense que c'est à cause de cela que je ne suis pas arrivée à m'attacher entièrement à Hannah. Pour moi, ce style de langage était trop accentué. Par contre, j'ai ressenti plus de sensations à partir du moment où certaines révélations arrivent. Elles créent d'ailleurs un petit suspense, qui fait que j'ai occulté la façon de parler pour ne penser qu'aux événements qui arrivaient dans la vie de Hannah. Je ne peux en dire plus, mais ces faits m'ont tenue en haleine jusqu'à la fin. Cette fin d'ailleurs où on retrouve Hannah treize ans plus tard, elle a grandi, changé, et raconte ce qui lui est arrivé pendant ces années. Le langage à ce moment est totalement différent, c'est celui d'une adulte, elle explique d'ailleurs qu'elle a dû travailler son français pour mieux s'exprimer. Et ça, j'ai plutôt appécié que l'auteur souligne ceci. Ceci dit, j'ai trouvé que l'auteur se mettait très bien dans la peau d'une petite fille, avec ses pensées, ses premiers émois, ses querelles avec les autres filles et garçons de son âge. Pour moi, cet exercice me semble assez difficile, et Laurent Malot l'a réussi avec brio.

J'ai beaucoup aimé ce final, porteur d'espoir, qui tire les leçons sur tout ce qui s'est passé durant le livre, sur la lourdeur des secrets et des silences. Cette histoire est une belle leçon de vie, avec de beaux messages où chacun peut se reconnaître.

Dans l'ensemble, c'est une lecture que j'ai appréciée, avec laquelle j'ai passé un bon moment, où les émotions diverses étaient au rendez-vous ; j'ai souvent souri, par les réflexions et les actes, j'ai souvent été émue aussi par les différents personnages et leurs vies. Pour son insouciance et sa légèreté, j'ai souvent pensé au film La guerre des boutons en lisant certaines scènes où les enfants font des blagues un peu folles. C'est un film qui me fait toujours sourire, même en l'ayant vu plusieurs fois.

Ce livre restera un bon moment, et me restera sûrement en mémoire. Il s'est lu assez vite, il faut dire qu'il n'est pas non plus très gros. J'ai découvert la plume de Laurent Malot avec ce livre et j'en suis ravie, je vais le suivre de près, j'ai vu dans sa bibliographie qu'il a écrit un thriller, L'abbaye blanche, qui se passe dans la région où j'habite, le Jura, et du coup cela m'attire encore plus.

Le choix pour la lecture de février du prix risque déjà d'être difficile. Il me reste encore un roman à lire...à suivre donc. En tout cas, grâce à ce prix, je fais de très belles découvertes, c'est fort plaisant.


 

Pour finir, je remercie Laurent Malot pour tout ce qu'il m'a fait vivre le temps d'une lecture.

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