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Marie-Nel lit

Frankenstein 1918 de Johan Heliot

19 Décembre 2018 , Rédigé par Marie Nel Publié dans #fantastique

Frankenstein 1918 de Johan Heliot

Publié aux Éditions Atalante

 

 

Résumé :

 

Grande Guerre, 1914. Après un premier engagement désastreux, les Anglais décident l'opération Frankenstein : plutôt que de construire des chars, on créera de la chair à canon.

À partir des archives du fameux docteur et grâce à la production d'électricité à présent industrialisée, des unités de soldats pouvant être sacrifiés sans remords seront fabriquées ? les champs de bataille du nord de la France fourniront la « matière première ». Winston Churchill est nommé responsable de l'unité de recherche sur la régénération.

Les « frankies » vont faire leurs preuves sur le terrain, mais la société se partage entre pro et anti. L'opération finalement interrompue, l'un d'eux, Victor, échappe au massacre puis est secouru par Marie Curie qui le rend à la vie consciente grâce aux radiations.

Réfugié dans les décombres de Londres, qui a été détruite et rendue inhabitable par un bombardement à l'arme chimique, Victor retrouve le laboratoire où il est né, y recueille Churchill et engage un combat pour l'émancipation des siens. C'est là qu'un jeune couple, elle, résistante à l'occupation, lui, historien, finit par le retrouver en 1958, dans l'espoir de lever le voile sur ce versant secret de l'Histoire que la censure en vigueur ne suffit pas à expliquer.

 

Johan Heliot entrecroise, tel un tisseur, des récits de Winston Churchill tirés de ses Mémoires secrets, les témoignages d'une Marie Curie désabusée par la folie des hommes, et le journal intime du personnage principal, Victor. Se dessine alors, au fil de la lecture, un panorama fascinant des conséquences d'une Grande Guerre qui n'aurait pas pris fin en 1918, dont le c?ur est un hommage à Mary Shelley et sa fameuse créature.

 

 

Mon Avis :

 

Je me devais de lire ce roman avant la fin de l'année puisqu'il parle d'un sujet important de notre siècle dernier pour lequel on vient de fêter le centenaire de son armistice. C'est une chronique assez dure à écrire, il y a tellement de choses dont je voudrais vous parler, tout en ne spoliant pas l'histoire. Je trouve déjà que le résumé en dit bien assez, je ne vais donc pas revenir de trop sur le contenu.

 

Johan Heliot a crée une uchronie dans laquelle la guerre ne se serait pas finie en 1918, comme dans la réalité, mais quarante ans plus tard et se serait ainsi appelée la Guerre Terminale. Les batailles contre les Prussiens sont nombreuses et comme dans la « vraie », elles font beaucoup de dégâts matériels et humains. Les morts sont innombrables, et pour pallier à cela, les Anglais décident de créer une armée d'êtres entièrement fabriqués grâce à un processus chimique et physique. Ces êtres sont appelés des « non-nés » et sont le résultat d'un assemblage de plusieurs corps venant des soldats morts. Tout ceci repose sur les expériences du docteur Frankenstein. Ils sont plus résistants et surtout ne causent aucun souci, ils sont là pour combattre et tuer. Mais la guerre est aussi un combat d'argent et il vaut mieux construire des armes, le projet est ainsi abandonné, les « non-nés » massacrés, sauf un, Victor, le premier de tous, qui échappe à la mort. Grâce à des aides importantes et inattendues, il va pouvoir continuer de vivre.

 

Ce qui est à souligner ici, c'est que l'auteur s'est appuyé sur des documents inexistants, sauf dans l'imaginaire d'autres écrivains, puisque le personnage du professeur Frankenstein se réfère au roman Frankenstein ou le Prométhée moderne écrit par Mary Shelley en 1818...encore un anniversaire, concordance des dates, coïncidence...tout était là pour donner cette inspiration à Johan Heliot et créer un ouvrage plus vrai que nature. Il n'hésite pas, d'ailleurs, à évoquer de grands noms de notre histoire moderne pour étayer ses recherches. On verra ainsi apparaître Ernest Hémingway, mais aussi Jean Teillac, successeur de Frédéric Joliot-Curie à l'institut Curie. Justement, Marie et sa fille Irène auront un rôle très important dans la vie de Victor. Moi qui aime beaucoup ce personnage de Marie Curie, j'ai retrouvé avec plaisir ses nombreuses recherches, sa clairvoyance, son esprit d'analyse.

 

Le roman est donc une succession d'extraits de journaux et mémoires, celui du héros, Edmond Laroche-Voisin, mais aussi le très réputé Winston Churchill qui aura un tout autre rôle que celui que l'on connait. Malgré l'extravagance des faits relatés, des expériences menées, tous ces ouvrages donnent un effet très réaliste à l'histoire. Je me suis plu à imaginer que ces écrits auraient pu exister, mais encore heureux que ce ne se soit pas passé ainsi au niveau de la guerre, de sa durée. À noter que Johan Heliot a mêlé des éléments de la seconde guerre avec la résistance et la Gestapo qui font leur apparition, ajoutant une petite touche de réalisme à nouveau.

 

Malgré un départ un peu lent car il a fallu s'habituer au style de l'auteur qui fait de longues phrases agrémentées d’apartés en paragraphes, le roman se laisse lire facilement et on est vite happé par les événements nombreux qui se passent dans la vie de tous ces personnages. La partie où c'est Victor qui raconte sa version est très addictive, j'aurais aimé qu'elle arrive un peu plus tôt dans le roman, elle apporte une autre vision intéressante.

Je voudrais d'ailleurs citer une phrase que ce personnage hors du commun dit et qui, je trouve, trouve toute sa résonnance dans notre actualité de maintenant :

 

« L'homme soumis à trop d'exigences qui le brident a besoin d'explosions de violence pour lui rappeler que jadis il a été libre. »

 

Je ne ferai pas plus de commentaire, elle colle parfaitement avec ce qu'il se passe dans notre société.

 

Donc, en conclusion, j'ai passé un bon moment de lecture, très enrichissant malgré qu'il s'agisse d'imaginaire, j'ai appris plein de choses sur Mary Shelley, les Curie, etc.. Je ne suis pourtant pas fan de ce genre, l'uchronie, mais quand c'est bien écrit et que ça frôle notre réalité, cela donne une expérience de lecture étonnante. Bien sûr, certains faits ne pourraient pas se réaliser, mais c'est tellement bien amené ici qu'on y croit. L'intrigue par elle-même n'est pas ce que je retiendrai en particulier, toute la force repose dans l'invention des écrits et des documents. En tout cas, Johan Heliot fait preuve d'une imagination débordante, un nouvel auteur que je vais retenir et suivre pour un de ses prochain écrits.

 

Je le remercie pour cette lecture incroyable et remercie également les éditions Les Escales.

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