Au nom de ma mère de Hanni Münzer
Publié aux Éditions de l'Archipel
Résumé :
JUSQU’OÙ UNE MÈRE PEUT-ELLE ALLER POUR SAUVER SES ENFANTS ?
Étudiante à Seattle, Felicity reçoit un appel : Martha, sa mère, a disparu... Felicity la retrouve à Rome, où Martha s’est enfuie avec des archives familiales.
Martha a en effet découvert une longue lettre écrite par sa propre mère, Deborah, fille d’une diva qui connut son heure de gloire aux débuts du IIIe Reich. Une lettre qui va plonger Felicity dans une quête douloureuse.
Alternant passé et présent, ce roman mêle amour et trahison, colère et culpabilité, péché et expiation, autour d’un secret de famille courant sur quatre générations.
Mon Avis :
Lorsque les éditions de l'Archipel ont fait un appel de chroniques en choisissant un de leurs romans, j'ai tout de suite été attirée par la couverture, ce regard azur pénétrant d'une superbe jeune femme, coiffée à la mode de l'entre-deux guerres, et le résumé m'a convaincue dans mon choix. Je suis contente d'avoir été sélectionnée, j'ai reçu le roman au format papier, c'est un objet très beau et le contenu l'est encore plus.
Comme dit dans le résumé, tout commence par cet appel que reçoit Felicity, une jeune femme étudiant à Seattle, rencontrant quelques problèmes de couple. Sa mère, Martha, a disparu. Elle la retrouve à Rome, elle s'est enfuie là-bas car elle a découvert, à la mort de sa propre mère survenue quelques jours plus tôt, des papiers relatant l'histoire familiale de Martha. Felicity va en apprendre encore plus suite à la traduction par un prêtre d'un carnet venant de sa grand-mère. Elle préfère en prendre connaissance avant de le confier à sa mère, de peur de sa réaction.
Nous remontons alors le temps, en 1923, à Munich, pour faire la connaissance de Gustav et Elisabeth. Il est docteur, d'origine juive, elle est cantatrice. La capitale de la Bavière est déjà aux prises d'un certain Adolf Hitler que Gustav craint. Le couple a l'heureux bonheur d'avoir deux enfants, Deborah et Wolfgang. Ceux-ci vont grandir dans l'amour de leurs parents, mais aussi dans la peur. Gustav cherche à protéger sa famille et s'enfuir pour partir en Angleterre. Mais, leurs tentatives s'avèrent toujours reportées. Elisabeth est une belle femme que les dirigeants de l'Allemagne adulent pour sa voix et ses récitals. Elle ne peut refuser de chanter, quoiqu'elle puisse penser. Deborah grandit dans cette atmosphère, et va connaître la montée du nazisme et la guerre.
Vous vous doutez un peu de ce que va vivre cette famille, de ce que cette mère va essayer de faire pour protéger ses enfants. J'ai déjà lu d'autres histoires relatant ce douloureux passé, mais je n'ai pu m'empêcher d'être touchée, émue et attristée devant tout ce qui arrive à Gustav et Elisabeth, à Deborah et Wolfgang. Des femmes fortes, qui le deviendront encore plus avec la guerre. Deborah prendra conscience petit à petit, grâce à une amie, de la situation des juifs en Pologne, elle aura le courage et la volonté de faire ce qu'elle peut pour lutter contre. Mais parfois, il faut aussi penser à se protéger.
Ce roman est une belle saga familiale, où les femmes ont un grand rôle, ce qui est intéressant aussi, c'est d'avoir le point de vue de personnes allemandes vivant cette guerre qu'ils ne veulent pas. L'auteure nous explique dans la postface qu'elle s'est inspirée de certains personnages ayant vraiment existés, j'avoue que cela glace encore plus le sang quand on apprend ce qu'ils sont devenus, malgré leurs faits horribles. Le plus terrifiant a été de lire les paroles de la mère du filleul d'Hitler qui se reproche d'avoir empêché celui-ci de se suicider en 1923, combien auraient été épargnés ? Comme cela doit être dur de vivre avec ça...mais on ne peut pas refaire l'histoire, juste vivre avec... La transmission de ce passé est lourde, chargée, ici, elle se fait de fille en fille, et crée des liens forts lorsque tous les secrets sont révélés.
Hanni Münzer m'a profondément émue, elle n'épargne pas le lecteur, les horreurs de la vie quotidienne du nazisme, de la peur, de l'asservissement, de l'humiliation m'ont marquée, et pourtant on a l'impression de tout avoir lu de cette période. Non, il y a encore des histoires qui touchent. Au nom de ma mère en fait partie. Malgré quelques longueurs s'avérant par la suite nécessaire pour la compréhension, j'ai aimé cette lecture. La part du passé prend les trois quarts du roman, j'ai eu peur car je me voyais approcher de la fin et on n'était toujours pas revenu dans le présent avec Felicity et Martha. J'aurais peut-être aimé que cette dernière partie soit plus approfondie, mais je me rends compte maintenant qu'elle se suffit à elle-même et apporte les éléments essentiels pour bien conclure cette histoire difficile.
En tout cas, ce roman va rester graver dans ma mémoire, il serait bien qu'il soit lu par le plus grand nombre, pour ne pas oublier, qu'on garde en mémoire les atrocités commises pendant cette période, et ce qu'elles ont pu créer comme ravages sur des générations.
Je remercie chaleureusement les éditions de l'Archipel, grâce à eux, j'ai découvert un roman que je n'aurais peut-être pas lu d'emblée.