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Marie-Nel lit

La mer terrible selon Monet de Jean-Baptiste Gauvin

12 Janvier 2024 , Rédigé par Marie Nel

La mer terrible selon Monet de Jean-Baptiste Gauvin

Publié aux ateliers Henry Dougier

 

 

Résumé :

 

De septembre à novembre 1886, Claude Monet est à Belle-Île-en-Mer, l'île la plus vaste de Bretagne. Le peintre, jusqu'ici habitué à la mer d'Étretat, affronte un nouveau territoire : l'océan Atlantique. Belle-Île, c'est la "mer terrible", avec des tempêtes titanesques, mais aussi un soleil qui s'attarde plus longtemps que sur le continent et donne à la nature mille et une couleurs éblouissantes.
Dans cette solitude insulaire, Monet fera de belles rencontres : comme cet ancien pêcheur de homards, Poly, qui sera son porteur et dont Monet fera le portrait.
Un séjour qui sera un ancrage plus profond de son expression au monde.

 

À propos de l'auteur :

 

Jean-Baptiste Gauvin est auteur et journaliste spécialisé dans les arts visuels. Il écrit pour différentes revues d’art (L’Œil de la photographie, Like, Process, PointCulture…) et livres de photographie (Vincen Beeckman, Franco Fontana). Il a publié Au bord aux côtés du photographe Benjamin Hoffman (Les Éditions du Petit Oiseau), ainsi que les livres d’artistes Magma, Jackpot ! et Kopeck avec le peintre Félix Deschamps-Mak. Il vit et travaille à Paris.

 

Mon Avis :

 

La collection "Roman d'un chef-d'œuvre" aux ateliers Henry Dougier est une collection que j'aime beaucoup. Le principe est simple. C'est un récit qui mêle fiction et histoire autour d'une peinture, sculpture ou autre. L'auteur ou l'autrice raconte alors l'histoire de l'oeuvre, en la mêlant à la vie de l'artiste. Le narrateur peut être lui-même, ou l'artiste ou la famille de celui-ci. Cela permet d'en apprendre plus sur l'artiste. J'ai ainsi pu lire sur des œuvres de Van Gogh Frida Kahlo, Klimt, Hopper, et ce fut à chaque fois très enrichissant.

Claude Monet est un peintre que j'aime beaucoup, il est l'un des fondateurs de l'impressionnisme. Ces toiles sont très réalistes et invitent au voyage. J'ai d'ailleurs une reproduction chez moi du "Déjeuner" peint en 1872, qui donne très envie de s'asseoir à cette table dehors et prendre le thé. Ses toiles sont très lumineuses. Il aimait beaucoup être à Giverny ou à Etretat, mais là, dans ce livre, l'auteur nous emmène dans un autre lieu. En effet Monet a voulu explorer d'autres endroits pour trouver son inspiration et est parti à Belle-Île-en-Mer de septembre à novembre 1886. Il ne connait pas du tout cette île, il va trouver où se loger, et va partir à l'exploration de cette terre. Il va très vite être impressionné par la force de l'océan, son tumulte quand il vient s'écraser sur les rochers. Les tempêtes sont nombreuses et Monet a du mal à faire tenir son chevalet pour peindre lorsqu'il est dehors. Les couleurs sont différentes de ce qu'il connait sur le continent, et il est subjugué par tout cela. Il va peindre pendant ce séjour plusieurs tableaux dont celui qui nous intéresse "La mer terrible". Il va aussi rencontrer les habitants de l'île, s'intéresser à leurs modes de vie. Il va être aidé par un personnage typique de l'île, un ancien pêcheur du nom d'Hippolyte, surnommé Poly. Il va emmener Monet dans des endroits que lui seul connait, où la vue est belle, où les couleurs sont magnifiées. Il va l'aider à porter ses affaires, à les tenir face au vent. Monet va s'attacher à ce bonhomme, et, un jour de tempête, il fera le portrait de Poly, qui en sera très fier. 

Je me suis beaucoup attachée à ce Poly, il est simple, comme les habitants de là-bas, et en même temps il a tout compris de la vie. Il voue tout de suite une belle admiration à Monet. C'est un personnage hors du commun pour ces habitants de l'île, Poly aime regarder Monet peindre, révéler les couleurs de ce qu'il regarde et est fasciné. Ce que l'on peut comprendre, à une époque où les gens ne quittaient pas ou très peu leurs lieux d'habitation, voir arriver un monsieur du continent, avec tout son bagage de toiles, chevalet et peintures, est quand même rare. Monet et Poly sont deux personnages très intéressants que l'auteur a très bien travaillés. 

J'ai beaucoup aimé suivre Monet, il explique sa technique de peinture, de couleurs. Lorsqu'il est pris d'une envie de peindre, il ne démord pas de son idée, bravant les vents forts et les tempêtes. Sa femme est restée à Giverny, sa solitude lui permet de peindre autant qu'il en a envie. D'autres personnages célèbres font des apparitions, comme des références ou des amis de Monet. J'ai aimé rencontrer l'homme derrière l'artiste, ses pensées, ses émotions. Je l'aimais déjà avant ce livre, ce sentiment est renforcé maintenant que j'ai fait plus sa connaissance.

Je découvre l'auteur et je suis ravie. Son style est très bon, il raconte ce que fait le peintre avec beaucoup de simplicité, tout est accessible. Il s'est posté dans le rôle du narrateur, de celui qui est présent avec Monet et raconte ce qu'il voit. Cette narration à la troisième personne du singulier permet de garder une petite distance avec les personnages et d'avoir une vie d'ensemble sur les faits, les lieux. Tout est précis, l'auteur a dû faire un gros travail de recherche en amont de son écriture. Il donne d'ailleurs les références de livres qu'il a utilisés, j'en ai noté quelques-uns, car j'aimerais beaucoup approfondir ma connaissance sur l'homme qu'était Monet. Là je l'ai suivi sur quelques mois, maintenant, j'aimerais le faire sur sa vie entière, sur son influence et sur son oeuvre. C'est très intéressant et très enrichissant. J'adore quand ma lecture a ce double pouvoir de me divertir tout en m'instruire. 

Et tout comme les autres livres de cette collection, celui-ci est très beau, quand vous l'ouvrez, le tableau "La mer terrible" est reproduit sur les premiers volets, et celui sur Poly est lui sur les derniers volets. Je me suis aussi amusée à aller voir sur le net des références de peintures citées dans le livre, ou l'évocation d'autres artistes que je ne connaissais pas, comme les peintres Eugène Boudin et Paul Durand-Ruel, ou l'écrivain Octave Mirbeau. Je trouve cela très bien, ça élargit l'horizon et permet de faire des découvertes. D'ailleurs, à la fin du livre, il y a une partie que j'aime beaucoup et qui revient dans chaque livre, cela s'intitule "Regards croisés". Ce sont des extraits de correspondances, d'articles de journaux ou autres écrits qu'on fait des personnalités connues, des historiens et critiques d'art sur le personnage du roman, ici sur Monet. Et vous retrouvez juste après des repères biographiques où toutes les dates importantes sur Monet sont indiquées et recroisées avec d'autres sur des événements ou personnages. C'est très très intéressant. Je le souligne pour que le lecteur aille plus loin que le récit de l'histoire, et lise les pages qui se trouvent ensuite qui sont tout aussi plaisantes, et surtout instructives.

J'ai passé un excellent moment avec ce livre que je vous recommande si vous avez envie de savoir ce qu'il se cache derrière le tableau "La mer terrible". La lecture se fait rapidement, ce n'est pas péjoratif, le livre est assez court, et l'histoire est tellement prenante que je n'avais pas envie de la quitter. L'écriture de Jean-Baptiste Gauvin est très belle, avec de la poésie dans les phrases et les mots, de belles descriptions qui n'alourdissent pas le texte. Ce livre est vraiment une réussite. Pareil, je vous recommande également la collection "Le roman d'un chef-d'œuvre", qui vous fait découvrir des artistes, des œuvres, sans être rébarbatif dans le propos ou incompréhensible. Pour ma part, je continuerai de lire ces livres afin de m'enrichir encore plus de connaissances et d'images.

Il ne me reste plus qu'à remercier Jean-Baptiste Gauvin pour ce très bon moment de lecture. Et je remercie également les Ateliers Henry Dougier pour leur confiance renouvelée en mon blog.

Monet a choisi d'aller au-dehors, sous le soleil, sous la pluie, dans le vent, dans le froid, dans la neige et le givre. Il a choisi son motif. Pour lui, c'est le paysage. Le paysage sublime. Celui qui fait frissonner le sang, crève le cœur et donne comme des coups à l'âme.

Là, juste devant lui, se déploie une baie dévastée, peuplée de rochers tordus, immenses, coupés à tort et à travers, dans tous les sens, et, tout autour, la mer, gigantesque, éblouissante, sublime, vert émeraude ; la mer sur laquelle se mêlent les larmes du soleil et la bave des vagues.

Il jouit de cette promenade pleine de risques, pris en otage par la mer, peut-être proche à un moment de la mort, mais plus fort encore de son envie de vivre, de son envie de peindre, de son envie de montrer à tous le terrible visage de cette beauté sauvage.

Tout est mouvant. Tout est mouvement. C'est la vie même. C'est ce que le peintre veut saisir. Le mouvement de la vie, son flux et son reflux, ses variations incessantes, cette lumière qui survient, puis repart, puis se tourne, puis éblouit, puis s'en va, cet air qui navigue, qui chauffe, qui refroidit, qui éclabousse, qui crache un vent infernal puis effleure par une brise feutrée. Tout doit être fait pour saisir la nature à son meilleur effet.

Claude (Monet) est à tel point avalé par sa toile qu'il en oublie même sa fatigue, les heures qui passent, le froid qui le fait trembler.

Les mots sont bien une autre façon d'exprimer son regard sur le monde, ils ont aussi leurs lois, leurs cadres et leur palette de couleurs.

Ce n'est que devant un défi qui nous prend le ventre que nous pouvons multiplier nos forces, quadrupler nos capacités, nous surmener sans fatigue.

La mer terrible selon Monet de Jean-Baptiste Gauvin
La mer terrible selon Monet de Jean-Baptiste Gauvin
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