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Marie-Nel lit

Frieda de Annabel Abbs

17 Juin 2021 , Rédigé par Marie Nel

Frieda de Annabel Abbs

Publié aux éditions Pocket

 

 

Résumé :

 

Elle s’appelle Frieda von Richthofen. Cette jeune baronne allemande vit à Nottingham, mariée à un professeur austère et pudibond. Jusqu’à ce jour de 1912 où elle commet l’irréparable: elle quitte son mari et ses trois enfants pour vivre sa passion avec son amant, à Munich. Dans cette ville bruissante d’avant-gardes, la liberté des mœurs l’invite enfin au plaisir, dans les bras d’un disciple de Freud. Cette relation va donner naissance à l’un des plus grands scandales de son temps et quelques années plus tard, sa relation avec D.H. Lawrence inspirera le très sulfureux roman L’Amant de Lady Chatterley. Passée d’épouse et mère à maîtresse et muse, la scandaleuse paiera cependant chèrement le prix de sa liberté...

 

 

À propos de l'auteure :

 

Annabel Abbs a écrit pour The GuardianThe TelegraphThe Irish TimesPsychologies et ELLE. Elle s’est imposée comme la nouvelle auteure anglaise de romans biographiques à succès. Frieda, son premier roman à être traduit en français (Éditions Hervé Chopin, 2020), a été qualifié « livre de l’année » par l’influent magazine Times dans la catégorie des fictions historiques. La Fille de Joyce paraît chez le même éditeur en 2021 et a été sélectionné parmi les meilleurs romans de l’année par The Guardian et la Historical Novel Society.

 

 

Mon Avis :

 

La lecture du résumé de ce livre m'a tout de suite donné envie de le lire. J'aime les romans qui parlent de personnages ayant existé dans la réalité. Ici, il va s'agir de la baronne von Richthofen qui inspira le roman L'amant de Lady Chatterley de D.H Lawrence. J'avais très envie de découvrir cette femme, en avance sur son temps, sur sa vie sulfureuse. J'ai appris plein de choses, et j'aime quand mes lectures ont ce double pouvoir de m’enrichir et me divertir en même temps.

 

J'ai donc fait la connaissance de Frieda, elle est issue d’une noble famille. Elle est mariée avec Ernest avec qui elle a trois enfants. Ernest est professeur dans l’étymologie des mots, plutôt du genre austère et très pudique. Leur relation se passe bien, mais sans folies, et Frieda s'ennuie. Une de ses sœurs lui parlent un jour de sa propre expérience, elle est mariée elle aussi et elle a un amant, son mari a lui aussi une maitresse, ils pratiquent ce qu'on appelle l'amour libre et en dit le plus grand bien à Frieda. Sa sœur lui  raconte avoir rencontré un docteur, Otto Gross, qui prône l'amour libre et le plaisir sexuel. C’est un disciple de Freud, et il veut démontrer que la parole peut soigner des maladies. Ce sont les débuts de la psychanalyse. Frieda va donc partir à Munich pour rencontrer ce docteur, qui va alors lui exposer tous les bienfaits d’une sexualité libérée. Frieda aura une liaison avec lui, mais elle rentre tout de même chez elle en Angleterre auprès de son mari et ses enfants. Ernest reste très fermé aux idées révolutionnaires de sa femme. Celle-ci va rencontrer alors un élève de son mari, D.H Lawrence, fils de mineur et poète. Ils vont tous deux tomber sous leur charme habituel, Frieda va tout apprendre à Lawrence et ils débuteront une liaison. Frieda va même jusqu’à aller tout quitter pour cet homme, laisser ses enfants, elle veut vivre au plus près de ce qu'elle aspire. Mais cela ne va pas être sans embûches. La réaction de Ernest est forte, il ne veut pas que Frieda voit ses enfants, ceux-ci vont lui manquer. Lawrence se révèle être parfois un autre homme, lui veut épouser Frieda, elle ne veut pas, elle veut rester libre. La vie va ainsi se compliquer pour elle.

 

Frieda sera la source d’inspiration pour de nombreux ouvrages de Lawrence, dont le plus connu L'amant de Lady Chatterley a fait couler beaucoup d'encre, surtout à l'époque où il a été publié. Il a longtemps été interdit et publié bien après la mort de son auteur. J'ai trouvé l'histoire vraiment très intéressante. Je n’ai jamais lu ce roman de Lawrence, je le connais de réputation, je sais qu'il est très sulfureux et qu'il a suscité pas mal de réactions. Mais je ne connaissais pas du tout les origines de ce roman, et j'ai été très intéressée de découvrir la femme qui se cache derrière cette histoire.

J’ai beaucoup aimé suivre Frieda, elle ne veut pas rentrer dans le moule de la gentille femme au foyer qui s'occupe de son mari et de ses enfants sans ne jamais rien dire. On est au tout début du 20ème siècle, en 1907, la femme porte encore un corset, et on ne lui demande pas son avis. Je trouve cette période toujours très intéressante, pas si lointaine que ça, un siècle c’est peu dans l'histoire de l’humanité, nos grand-mères n'avaient pas la vie facile. Il est bon de lire des romans sur ces temps, pour ne pas oublier ce que nos aïeules ont connu, pour ne pas revivre ces mêmes situations. Heureusement, la parole se libère de plus en plus maintenant.

Bon, je m'écarte du sujet. Frieda est un personnage vraiment très intéressant à suivre. Elle vit une situation très compliquée. Elle veut à la fois être libre, et en même temps continuer sa vie familiale. Elle voudrait suivre cette mode lancée à Munich où un couple peut se conjuguer à trois personnes et plus. Mais, on se doute bien que Ernest ne va pas le voir de cette façon, il a reçu une éducation très stricte, et n'a pas du tout la même vision du couple que sa femme. La pauvre Frieda va devoir faire des choix, Ernest va être très dur avec elle. Et elle ne sera même pas certaine de la décision qu'elle prendra. En quittant son mari pour être plus libre, elle risque de retomber dans une situation pas si libérée que cela, car Lawrence est très possessif avec elle, même vis-à-vis de ses enfants. Au final, je ne suis pas sure qu'elle ait vraiment eu ce qu'elle voulait.

 

Ce que j’ai fortement apprécié dans ce roman, c’est que l’autrice, Annabel Habbs a su mêler les faits historiques à une histoire plus romancée. Elle explique à la fin du livre qu'elle a pris certaines libertés en ne mentionnant pas tous les amants que Frieda a eus, pour se consacrer uniquement sur Otto, Ernest et Lawrence. Elle a d'ailleurs dû faire un travail de recherches très important pour apporter autant de précisions. J’ai beaucoup aimé qu'elle explique tout son parcours à la fin du livre, qu'elle relate aussi en quelques mots la vie de chaque personnage, ce qui leur est arrivé après. Elle donne aussi une liste d'ouvrages avec lesquels elle a travaillé pour être au plus près de la réalité. J'en ai repéré quelques-uns très  intéressants. C’est une période qui me plaît toujours beaucoup dans les romans. On sent, en lisant le livre, toute la passion de l'autrice pour Frieda, sa vie. Elle brosse un portrait juste de cette femme, sans l'embellir de trop, en n’étant jamais dans le jugement.

 

Moi-même, de mon côté, je me suis très vite attachée à Frieda, je ne suis pas forcément d’accord avec toutes les idées qu'elle a pu avoir. Mais je comprends ses choix et ses décisions quand je replace sa vie dans le contexte historique. Quand des personnes sont très bridées, elles partent parfois dans des extrêmes pour essayer de se libérer de leurs carcans. C’est le cas avec Frieda.

Tout ceci ne serait rien sans le talent de l'autrice pour nous raconter cette histoire. C’est d’une très grande fluidité, les descriptions n’apportent aucune lourdeur au récit. On n' pas l’impression de lire un roman historique tellement il est accessible et à la portée de tous. L'autrice a très bien décrit également les sentiments traversés par les différents personnages. Je me suis très vite attachée à eux et pourtant le choix narratif n'est pas celui auquel je suis le plus sensible pour ressentir les émotions. Tout est écrit à la troisième personne du singulier, et j'ai trouvé ce choix fort judicieux car il permet de garder une certaine distance avec le personnage principal, ce qui n'est pas négligeable, les émotions sont parfois à vif et cette distance permet de ne pas toujours tout se prendre en pleine figure..

Je me suis également attachée aux autres personnages, même si tout tourne beaucoup autour de Frieda et que c’est celle qui domine le tout. Les hommes de l’histoire m'ont touchée aussi, dans leurs forces et leurs faiblesses, ils m'ont aussi énervée dans certains de leurs actes ou réflexions. Ce sont des personnages qui ne peuvent pas laisser indifférents, on ne peut pas rester neutre face à eux, et je trouve que c’est la grande force de ce roman. Tout semble si réel, et savoir qu'ils ont tous réellement existé est encore plus troublant.

 

Je me suis régalée avec ce livre. Il s'est lu rapidement, la lecture est addictive et rythmée par des chapitres courts qui alternent entre les personnages. La parole sera même donnée aux enfants de Frieda et Ernest, et j'ai trouvé très intéressant d'avoir leurs ressentis d'enfant face à la situation de leurs parents. L’autrice a su se mettre à leur niveau et à imaginer les bonnes réactions. La lecture a aussi été rendue addictive grâce aux faits, on a tellement envie de savoir ce qu'il va se passer pour Frieda qu'on tourne les pages fébrilement. Une sorte de suspense est ainsi instauré.

J'ai également beaucoup aimé découvrir la plume de Annabel Abbs, elle est très agréable à lire, elle sait livrer de  beaux messages au travers de ses personnages, elle sait rester près des faits historiques tout en rendant la lecture facile. C’est son second roman  mais le premier traduit en français. Un nouveau roman vient de sortir aux éditions Hervé Chopin, La fille de Joyce, une histoire de femmes encore très intéressante de Lucia Joyce, fille de James Joyce et amoureuse de Samuel Beckett. Rien que le résumé me tente déjà énormément. Je note donc cette autrice dans mes auteurs à suivre, je la lirai très sûrement à nouveau.

Je ne peux que vous conseiller ce roman, même si vous n'aimez pas les romans historiques, il est toujours intéressant de se remémorer les conditions de vie des femmes au siècle dernier et de suivre la vie de femmes qui ont influencé des artistes et des écrivains. Et comme l'histoire est bien romancée, cela rend la lecture encore plus aisée.

 

Même si Annabel Abbs ne lit jamais cette chronique, je lui adresse tout de même tous mes remerciements pour ce moment intense de lecture. Un grand merci à la masse critique de Babelio et aux éditions Pocket de m'avoir permis de faire une belle découverte.

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